L’arrivée du chemin de fer
En 1875, le tracé de la ligne de chemin de fer longeant la Vienne a été préféré à celui des plateaux par Bujaleuf. Mais les travaux n’en furent pas moins considérables et ce parcours sinueux dans la vallée encaissée, surtout depuis Châteauneuf-Bujaleuf, obligea à la construction de nombreux ouvrages d’art. De Limoges à Eymoutiers, la différence de niveau est de 200 m et il a fallu creuser 8 tunnels, inférieurs au gabarit S.N.C.F., et 2 galeries voûtées. Depuis Le Palais, 8 viaducs et ponts d’importance ont été nécessaires. C’est une vraie ligne de montagne. En partant d’Eymoutiers, après le tunnel de Toulondit se rencontre le tunnel de Fougeolles ou du Château-Repentit, de 90 m de long.
La gare d’Eymoutiers a été mise en service, comme la ligne, le 4 janvier 1881. Elle est construite sur le modèle de la Compagnie des Charentes. L’exploitation de la ligne Limoges-Eymoutiers-Meymac était assurée par la Compagnie des Chemins de Fer de Paris-Orléans. Les trains étaient souvent mixtes : marchandises et voyageurs. Le local à droite de la gare abritait la chaufferie des bouillottes qui étaient des récipients métalliques d’environ 1,50 m de long que l’on glissait dans les compartiments, sous les pieds des voyageurs, pour les réchauffer.
L’inauguration fut faite le 5 janvier 1881. Le Président Sadi-Carnot, venu à Limoges, délégua vers Eymoutiers son sous-secrétaire d’état, M. Raynal qui vint par le train, accompagné du sénateur Justin Ninard et d’une cohorte d’officiels. Ils furent accueillis dans une gare d’Eymoutiers enneigée mais pavoisée et dans la ville en fête. La municipalité Nony offrit un banquet de 120 couverts à l’hôtel Pintou où de nouveaux projets furent élaborés (malheureusement sans suite), comme la construction d’une ligne Eymoutiers-Bourganeuf ou l’arrivée du gaz de ville dans la cité pelaude.
La gare de Bussy-Varache
Le viaduc de Legaud
La gare d’Eymoutiers côté voies
La gare d’Eymoutiers côté rue
Le pont Métallique et la Vienne gelée
Vapeur au passage à niveau
Vapeur au pont Métallique
Viaduc des 24 Piles
Train touristique à vapeur
LE TRONÇON LE PALAIS-SUR-VIENNE à EYMOUTIERS
A la sortie de la gare, la ligne franchit la Vienne sur un pont avant de s’engouffrer sous le tunnel de Toulondit. Le chemin de fer a désenclavé la région et lui a apporté un regain d’activité. Les marchandises transportées étaient diverses : bois de châtaignier pour le tannin, bestiaux, vin en wagons-foudres, pavés de granit, paille pour les papeteries, grains, chaux vive en wagons-tombereaux pour l’agriculture… Le trafic voyageurs était important et les voitures étaient bondées les jours de foire.
Puis la voie traverse la Vienne, face au barrage de Bussy, sur le pont de Mingonnat, ouvrage d’une arche et de 17 m de haut. Immédiatement après, c’est le tunnel de Couégnas ou Tunnel Dur, de 157 m de long, non maçonné, percé tel quel dans le dur granit. Puis vient le plus long tunnel de la ligne, celui de Farsac ou Tunnel Sourd avec ses 285 m.
La locomotive à haute cheminée, jaune du laiton qui la recouvre, tirait son convoi en 3 heures, à l’origine, depuis Limoges. Net progrès par rapport à la diligence qui mettait 9 à 10 heures pour relier Eymoutiers à la préfecture du département !
Les travaux de la ligne avaient commencé en 1876 et ont duré 4 ans et demi. Un véritable exploit quand on songe aux difficultés naturelles rencontrées et aux faibles moyens dont les bâtisseurs disposaient. Plus de 1 500 ouvriers furent utilisés sur les différents chantiers et constituèrent une population nouvelle animée et hautement colorée. Ils venaient de la France entière et de pays voisins (Italie, Espagne), quelques-uns étaient des Compagnons du Tour de France, adeptes du Saint-Simonisme. Certains ont fait souche et sont restés dans la région. Pour contenir ces hommes souvent turbulents, les brigades de gendarmerie, comme à Saint-Léonard, furent renforcées et celle de Bujaleuf créée.
La voie passe, au-dessus de l’usine sur une série d’arcades appelées viaduc des 24 Piles (improprement nommé viaduc de la Varache). Il mesure 305 m de long pour 20 de haut et les parois très pentues de la vallée de la Vienne à cet endroit ont imposé sa construction. Au loin se dessine la silhouette du château de la Rivière. Après ce sera le tunnel de la Rivière avec ses 155 m de long, puis vient le petit viaduc de la Varache ou arcades de la Rivière, de 173 m de long pour 19 de haut. Sa construction a été motivée par les mêmes raisons que le viaduc des 24 Piles. Ensuite c’est la halte de Bussy-Varache, aujourd’hui démolie.
Puis la ligne traverse la Vienne sur le grand viaduc de la Varache, avec 10 arches, de 125 m de long, de 21 de haut et s’engage aussitôt dans le tunnel de la Varache, long de 213 m, pénétrant sur la commune d’Augne et quittant celles d’Eymoutiers. Elle la retrouvera au viaduc de la Pénelle avec ses 5 arches, 109 m de long et 20 de haut, avant de s’engouffrer sous le tunnel du même nom, de 165 m de long. Ici, elle quitte définitivement la commune et le canton d’Eymoutiers pour pénétrer dans celui de Châteauneuf-la-Forêt par la commune de Neuvic-Entier.
Elle arrive alors à la gare Châteauneuf-Bujaleuf. Le tracé originel prévoyait de passer par le plateau et il devait y avoir une gare au bourg de Bujaleuf. M. de Bony, le propriétaire des terrains s’opposant au passage du chemin de fer, la halte fut prévue à Bazenant. Mais la compagnie préféra le tracé longeant la vallée de la Vienne, d’autant que Monsieur du Chalard l’invita à établir la gare proche de son château, arguant qu’outre Bujaleuf, elle desservirait aussi Neuvic et Châteauneuf. La gare fut construite sur le territoire de la commune de Neuvic-Entier.
LE TRONÇON EYMOUTIERS-MEYMAC
Le tronçon Eymoutiers-Meymac de la ligne de chemin de fer a été mis en service en 1883. Le train, en quittant la gare traverse la Vienne sur le fameux pont de Fer ou Métallique, ouvrage de 120 m de long sur 7,60 m de haut.
La ligne d’Auvergne, Limoges-Eymoutiers-Meymac, traverse la Vienne, après le château, sur le pont de la Font-Macaire, ouvrage maçonné de 3 arches et d’une longueur de 41 m par 8 de haut.
Sur le ruisseau, dit de Plainartige, a été édifié un important moulin à cylindres qui était tenu, à l’époque, par Monsieur Louis Jacques. Derrière, la ligne de chemin de fer franchit le cours d’eau sur un imposant viaduc de 5 arches, de 23 m de haut et de 78 m de long.
Au-dessus de Plainartige et avant Plafet, la ligne Eymoutiers-Meymac longe la vallée encaissée du ruisseau de Plainartige (ou de Lacelle). La pente, par endroit trop abrupte, a imposé, sur la traversée de la commune de l’Eglise-aux-Bois, la construction de nombreux ouvrages d’art. D’abord deux séries d’arcades de 12 arches encadrent un tunnel, puis c’est le grand viaduc du Martin-Roche, avant le pont métallique qui enjambe le ruisseau.
Voilà déjà bien longtemps que l’on n’aperçoit plus le panache des locos à vapeur, si ce n’est quelques jours d’été emportant les wagons de VVV. L’autorail et le diesel ont supplanté le charbon mais la ligne est toujours en activité et joue son rôle de liaison, de service et de désenclavement. La gare d’Eymoutiers s’appelle désormais « Eymoutiers – Lac de Vassivière ». Les TER, petits TGV, y circulent, financés par le Conseil Régional et acheminent les voyageurs vers Limoges ou vers Ussel. Mais regrettons que le fret aille déclinant et que le transport du bois reste bien modeste. Espérons cependant que ce service public indispensable perdure le plus longtemps possible.
RESISTANCE
Apposés sur le mur de la gare deux plaques font référence à la Résistance dans notre région.
Dans une période plus récente, Eymoutiers a su montrer son caractère en devenant terre de Résistance. Les maquis dirigés par Georges Guingouin s’y sont montrés très actifs.
Divers actions sont à mettre à leur actif comme la destruction de la botteleuse de la gare, dès 1942 (plaque verte), ou du viaduc de Bussy, afin de retarder la remontée des troupes allemandes vers la Normandie.
Des accrochages eurent lieu en 1944 entre les maquisards et l’armée allemande souvent épaulée par la milice, notamment après la bataille du Mont Gargan. Les stèles de Farsac et la Condamine rappellent le sacrifice de ces combattants de l’ombre, ainsi que de civils exécutés par les nazis.
L’autre plaque rend hommage au sacrifice d’Alexandre Rouffiat, employé des chemins de fer.
Le Cyclope, hommage à Georges Guingouin par Paul Rebeyrolle
Georges Guingouin
Plaque rappelant la destruction de la botteleuse
Plaque en hommage à Alexandre Rouffiat
Viaduc de Bussy détruit par le Maquis