Le culte de Sainte Anne
Sainte-Anne était un lieu de pèlerinage qui se faisait en procession le mardi de Pentecôte. Tous les corps y assistaient, les prêtres, les consuls et presque toute la ville d’Eymoutiers. Une grand’messe y était célébrée par le curé de Notre-Dame, l’église paroissiale d’Eymoutiers, pour le roi et sa famille. Il fallait passer devant la statue de la sainte, en fait un groupe de granite de 6 pieds de haut représentant sainte Anne tenant l’enfant Jésus sur ses genoux. Après la messe un grand diner était offert au clergé et aux officiers municipaux. Puis tout le monde regagnait Eymoutiers via Villevaleix. La tradition veut que là le curé offre la collation aux pèlerins, retour de Sainte-Anne. Devant l’affluence, il décida de mettre un terme à cette coutume peu avant la Révolution.
Différentes photos des statues :
au 5 rue des Ursulines
au 8 rue des Ursulines
au 8 rue de la Collégiale
au 10 rue de la collégiale
au 6 rue de la République
au 2 rue des Maquisards
au 3 rue des Maquisards
au 6 rue du 18 juin 1940
au 2 rue Gabriel Péri
Le parcours urbain à travers Eymoutiers, point de départ de la procession, était jalonné de statues de la sainte, souvent dans des niches. Pour certains, elles marquaient aussi l’emplacement de buvettes judicieusement disposées et qui permettaient de prendre ses précautions, en quelque sorte. Il restait encore sept kilomètres à parcourir avant d’atteindre la butte de Sainte-Anne et ce sans rien trouver à boire !
Concernant le culte de sainte Anne, Maurice Robert en parlait ainsi lors de la nuit du Patrimoine de 1998 :
« A Eymoutiers, la vénération pour sainte Anne, mère de la sainte Vierge, est égale sinon supérieure à celle de saint Psalmet, l’ermite fondateur.
Et les Pelauds, jadis, ont certainement regretté plus d’une fois que la sainte ait élu domicile sur ce piton rocheux de Sainte-Anne qui n’était même pas le siège d’une paroisse, réservée à Saint-Priest.
Ils s’en consolaient de trois manières. D’abord ils détenaient le reliquaire et les reliques en leur Collégiale, au prétexte qu’elles étaient mal protégées à Saint-Priest. Ensuite ils possédaient cette réplique de la sainte Anne trinitaire, dans sa niche de la rue des Ursulines et cette représentation de sainte Anne sur les remarquables vitraux du chœur de la Collégiale. Enfin ils processionnaient au moins une fois l’an en juillet, et même à Pentecôte, jusqu’à Sainte-Anne, un lumet à la main, derrière les prêtres et les consuls et célébraient une grande messe en l’honneur de la famille royale, suivie des agapes rituelles. Et bien des pèlerins ne manquaient pas de faire aussi dévotion à la bonne fontaine qui avait, entre autres vertus, celle de faire venir la pluie quand le beau temps s’éternisait. Les vieux curés s’offusquaient, paraît-il, de ces rites antiques, quasi païens. Un poème sur sainte Anne qu’aurait écrit l’abbé François Richard, rappelant l’antiquité du lieu, siège d’une commanderie, nous donne le texte de l’oraison qu’on devait adresser à la sainte :
Sainte Anne dont la fille est la vierge Marie
Donnez-nous bonne mort et l’éternelle vie.
À ceux et celles qui préféraient la simple vie à l’éternelle félicité, et l’amour à la mort, on doit rappeler que sainte Anne favorise les mariages des jeunes filles qui touchent le loquet avec dévotion. Elle peut aussi favoriser la venue d’un enfant. Anne d’Autriche qui connaissait les vertus du verrou de Saint-Léonard, fit beaucoup pour que se répande aussi le culte de sainte Anne.
Enfin, la sainte avait la réputation de rendre leur lait aux mères nourricières, pour peu qu’on lui fit dire la messe. C’est sans doute la raison pour laquelle on vénérait ici, au XVIIe siècle, une relique spécifique, l’une des mamelles de la sainte, selon des textes du XVIIe, qu’il fallait toucher de la main, ainsi que le rapporte le Prévôt du Chapitre d’Eymoutiers, lequel assure tous les chanoines, se firent le devoir, sinon le plaisir d’une caresse, en tout bien tout honneur s’entend.